La valse des travaux routiers
Je commence à détester les cônes orange. Par contre, s’il n’y avait que ces objets colorés accompagnés des innombrables bouchons de la circulation, je pense que j’arriverais à garder mon calme...
Jeudi dernier, j’avais bien remarqué des panneaux de circulation qu’on avait déposés le long de la rue située à côté de chez nous. Vous savez... ces affiches oranges qui vous indiquent un détour ou une fermeture de voie... oh oh! Il faut noter que notre résidence est situé sur un coin de rue. Vendredi, trop pressée pour prendre la route vers ma destination de la fin de semaine, l’idée effrayante qu’on s’apprêtait à faire des travaux dans mon coin m’est complètement sortie de la tête.
J‘assume le coup en revenant dimanche en fin de soirée. En mon absence, on avait marqué l’asphalte presque neuf de signe en tous genres : des traits, des ronds, des croix, etc. Sur les terrains, de petits drapeaux jaunes flottaient dans le vent. Oh oh ! La sueur envahit mon front. Mon cœur palpite. « Pas encore ! » Que je me dis. Une visite du site web de la ville ne me donne aucune information. Demain, j’appellerai.
Lundi matin. Ceux qui me connaissent savent que je suis très matinale. J’étais donc assise dans le salon, lisant la presse plus sur mon iPad tout en écoutant en sourdine les nouvelles de RDI se dérouler sur la télé. Un bruit de moteur me fait tourner la tête. Un camion de livraison auquel est attachée une énorme remorque bloque soudainement l’entrée de notre stationnement.
Bip ! Bip ! Bip ! Le véhicule recule afin de mieux s’approcher de la bordure du terrain et, bien sûr, pour empêcher toute tentative d’évasion de notre part. Pendant que je note l’heure, 7 h (du matin), quelques hommes aux casques de plastiques et aux chandails jaunes déballent le contenu du camion. De gros tuyaux blancs s’alignent sur notre terrain. Ça y est ! C’est reparti !
Moins d’une demi-heure plus tard, les sons des travaux dans mon quartier s’ajoutent à tous ceux de la construction sur la 40 Ouest, non loin de chez nous. Très vite, le bruit infernal de la scie mécanique qui coupe l’asphalte sur le coin de la rue. Je me réfugie à l’arrière de la maison pour tenter d’avoir la paix. Non. Le système d’alarme du voisin, dérangé par les tremblements du sol causés par tous ces dérangements d’amélioration, abandonne des bruits stridents dans l’atmosphère. Parce que ce n’est pas la première fois, je sais qu’on l’arrêtera, qu’il repartira, qu’on le fera taire à nouveau puis qu’il reprendra son vacarme. C’est sûr que je n’entends pas le chant du pinson que j’aperçois percher dans mon lilas...
Lilian, est-ce que ton chalet est disponible aujourd’hui ? Peut-être que sur le bord du lac j’arriverais à trouver un peu de calme. J’aimerais entendre chanter les oiseaux, pouvoir localiser un écureuil par le bruissement des feuilles sur le sol ou apercevoir une couleuvre se faire dorer au soleil. Il me semble que ça me ferait du bien...
Je comprends que, dans notre pays situé dans une zone tempérée, nous n’avons pas d’autres choix que de faire la plupart des rénovations au cours de la période estivale. Mais c’est aussi la saison où o souhaite vivre dehors de longues heures tous les jours...
Quand la sonnerie de l’entrée retentit, j’ouvre la porte à un homme au casque blanc et portant un veston orange qui demande que nous déplacions notre auto. On s’apprête à faire un trou dans notre asphalte. J’apprends ainsi qu’il s’agit de travaux d’aqueduc. Six à huit semaines.
Il fait si beau aujourd’hui. Je résiste à rester en dedans à me morfondre et me demander quand les travaux se termineront. Je veux la paix aujourd’hui et je décide de profiter du moment présent. Faisant fi de l’atmosphère grouillante de sons discordants, je m’installe sur notre patio. Au programme aujourd’hui : un peu de lecture et, bien sûr, un peu d’écriture. Puis, quand la platebande que je veux nettoyer sera à l’ombre, j’irai jardiner.
Quels sont ces bruits qui percent cette cacophonie infernale ? Mon petit pinson de tantôt. Un autre son voyage jusqu’à moi; ça ressemble à celui d’un criquet. N’est-ce pas le cri strident de la cigale que je viens de percevoir ? Même la tondeuse du voisin libère, aujourd’hui, des décibels fort agréables; l’odeur de l’herbe fraîchement coupée camoufle les effluves de poussière de ciment et de gaz propane. Il y a les rayons du soleil qui rendent lumineuses toutes les plantes autour de moi.
C’est ça ! J’ai découvert l’art de percevoir ce qui me rend heureuse au travers tous ces mouvements de cette société qui grouille autour de moi. Les bruits de constructions perdent leur importance et, régulièrement, je lève les yeux de mon livre pour observer un son nouveau, un reflet original ou simplement pour sentir le vent glisser sur ma peau.
La vie est belle quand on s’adonne à porter notre intérêt sur l’essentiel.
Plume/ Suzie Pelletier
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